Traité contraignant sur les STN : menaces sur le processus

, par  CETIM

La 9e session du Groupe de travail intergouvernemental chargé d’élaborer un instrument international juridiquement contraignant sur les sociétés transnationales et autres entreprises à caractère transnational, tenue à Genève entre le 23 et le 27 octobre 2023, a été une fois de plus le théâtre de manœuvres de la part de sa présidence.

En effet, dès l’ouverture de la session, la présidence dudit Groupe, assurée par l’Équateur, a imposé une version « toilettée » par ses soins du projet de traité [1], ce qui a provoqué une levée de boucliers, principalement de la part du Groupe africain in corpore, mais également de certains États asiatiques et latino-américains.

Photo Credits : Victor Barro/Amigos de la Tierra

En effet, dans la version présentée par la présidence, quasiment aucune des propositions de la Campagne mondiale [2], provenant des mouvements sociaux et communautés affectées par les STN, n’est prise en compte. Pire, ce document non seulement ne respecte pas le mandat du Groupe de travail figurant dans la résolution 26/9, mais de plus il exclut de manière arbitraire des amendements des États en faveur d’un traité contraignant sur les STN.

Tel que formulé, le document présenté par la présidence n’aurait aucun impact sur l’impunité des STN et de leurs chaînes de valeur. Il ne contribuerait pas non plus à la restauration de la souveraineté populaire et étatique, mise à mal par la puissance de ces entités.

Au fond, le but avoué de la présidence est de modifier le mandat de ce Groupe de travail pour élargir la portée du projet de traité à n’importe quel type d’entreprise, quelles que soient ses caractéristiques et même si elle n’a aucune activité internationale.

Pourtant, le Groupe de travail en question a été créé dans le but de tenir pour responsables les STN qui violent les droits humains et échappent à tout contrôle juridique et démocratique en raison de montages juridiques complexes. Il est aussi supposé créer un mécanisme efficace afin que les victimes et communautés affectées par ces entités puissent obtenir justice. En ce sens, un traité sur ces entités devra clairement établir :

1) l’obligation des STN de se conformer aux normes internationales en matière de droits humains, de droit du travail et de protection de l’environnement ;

2) la responsabilité solidaire des STN avec leurs chaînes de valeur (filiales, fournisseurs, preneurs de licence, sous-traitants, etc.), sur les plans civil et pénal, tant pour les personnes morales que physiques (dirigeants des STN) ;

3) un Tribunal international pour la mise en œuvre dudit traité tel que préconisé par la Campagne mondiale, afin d’assurer l’accès à la justice des victimes et des communautés affectées.

La présidence a toutefois osé demander formellement la modification du mandat du Groupe de travail. Grâce à la mobilisation de la Campagne mondiale et des États précités, cette manœuvre a été déjouée. Cela dit, avec une présidence qui ne respecte pas le mandat confié et qui est uniquement à l’écoute des États occidentaux et du lobby des STN, la tâche est ardue pour la poursuite du processus. Pour le CETIM, un projet de traité qui ignore les revendications des peuples, des communautés affectées et des mouvements sociaux n’aurait aucune légitimité. C’est pourquoi, il est indispensable de poursuivre la lutte dans ce sens.

Voir en ligne : Traité contraignant sur les STN : menaces sur le processus

[1Cf. Updated draft legally binding instrument (clean version) to regulate, in international human rights law, the activities of transnational corporations and other business enterprises, July 2023.

[2Campagne mondiale pour revendiquer la souveraineté des peuples, démanteler le pouvoir des sociétés transnationales et mettre fin à leur impunité, un réseau international dont le CETIM fait partie et qui regroupe plus de 200 membres, représentants de victimes, de communautés affectées et des mouvements sociaux du monde entier.

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